Un ami Tunisien me disait que dans son
pays « la nouvelle génération » n'habitait pas la
Tunisie mais habitait internet. Cette idée me plaît et me semble
assez vraie. Et elle d'autant plus vraie dans des pays sous régime
dictatorial. Je sais pas comment c'est actuellement mais dans mon
souvenir c'était pas le sommet du festif sous Ben Ali, et ce, même
dans des endroits touristiques et à des périodes estivales... Le
net devient un endroit plus qu'un outil ; un endroit où l'on
peut être en contact avec l'extérieur, où l'on peut se rencontrer
à l'abri des regards indiscrets et parler de tout y compris de
Révolution. Le net a peut-être créé en peu de temps une culture autonome. C'est du moins ce que j'ai entendu dans ses propos. Le pouvoir est peut-être mort d'avoir sous-estimé la
force de frappe du net et de tous les outils qu'il offre.
Il me disait aussi que ces jeunes il ne
les comprenait pas parce qu'ils avaient la fâcheuse tendance à
brouiller les pistes. Il en voyait venir prier à la mosquée en
pantalon baggy tombant et dévoilant une impudique raie à chaque
fois qu'ils se prosternaient. En sortant, il les voyait aller flirter
ostensiblement ou encore aller manifester en démolissant tout. Pour
finir ils retournaient tranquillement à la faculté pour poursuivre
leurs études. Bien sûr, le paradoxe et la contradiction n'apparaît
que si l'on se place du point de vue de la plus pure orthodoxie
religieuse, sinon on se dit que ce sont des jeunes gens tout à fait
normaux et modernes. La modernité est à percevoir comme la capacité
à capter et assumer toutes les identités, toutes les influences et
le tout dans une grande décontraction. Et il me disait tout cela
avec un mélange d'admiration et de crainte devant l’émergence de
ce nouveau type de jeune maghrébin.
J'aurais pu lui objecter que le net
n'avait rien à voir là dedans et que la diaspora tunisienne avait
avait pu rapporter un nouveau mode de vie et précipiter les
changements qu'il décrivait ; que le tourisme aussi avait
précipité le contact entre les jeunes tunisiens et le reste du
monde... mais à quoi bon, je n'y crois qu'à moitié. Je vois bien
cette jeunesse connectée en permanence... Par contre il ne faut pas
trop fantasmer : le net n'est qu'un tuyau. Pendant que certains
sont connectés sur Youporn, d'autres doivent être sur « Djihad
et moules frites » et ceci n'empêche pas les premiers de
passer, d'un clic, du premier site vers le deuxième : tout
assumer concomitamment et avec naturel.
Le souci pour lui c'est que ces jeunes,
on ne peut plus les arrêter. Il est content qu'ils aient fait la
Révolution mais maintenant ce serait bien qu'ils rentrent sagement
chez eux. Les adultes vont s'occuper du reste. Sauf que voilà, comme
ils ne semblent pas prêts à obéir et semblent insatiables. Et
comment discuter avec eux puisqu'on ne les comprend plus. Ils ne sont
plus de chez nous et rejettent en bloc tous nos cadres, voire toutes
nos traditions. Du hors sol made in Tunisia. En somme un pays un pays
qui redécouvre la jeunesse qu'il avait mise sous serre et qui doit
dorénavant composer avec elle.
3 commentaires:
Je confirme, la tunisie sous ben ali ça craignait. A 10 heures, tt le monde au lit. Je suis sur qu en coree du nord on fait plus la fete, il y a moins d affiche du parti unique dans les bars, et moins de controles de police sur la route... Ataru
Ouais, tout est dans tout et son contraire quoi...
Ah le grand traumatisme d'Ataru!
@Herbs
Heu ouais sûrement.
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